Ma grand-mère était garde-barrière Tous les garçons du pays étaient amoureux De son teint couleur de lys et de ses yeux bleus En l'absence de son mari, que de rendez-vous étaient pris Et c'étaient de folles caresses entre l'office, le rapide et l'express Mais quand son amoureux devenait trop pressant Elle baissait les yeux d'un air décent Permettez, disait grand-mère, Faut que j'aille fermer ma barrière
{Refrain:} Avec son drapeau, sa p'tite trompette, son grand chapeau, Son joli corsage à carreaux, Elle fermait l' passage à niveau Et tandis que le train passait Elle réfléchissait, Réfléchissait Et les yeux baissés, grand-mère rougissait, Rougissait Saura-t-on jamais ce que tu penses ? Ah ah ah ah Saura-t-on jamais ce que tu penses En silence ? Avec ton drapeau, ta p'tite trompette, ton grand chapeau, T'étais la reine des passages à niveau Entre Paris et Bordeaux
Mais grand-mère était trop familière Et tous les p'tits racontars Et les p'tits potins Circulaient de gare en gare Allant à bon train, Tous les trains ralentissaient d'vant sa barrière Quand ils passaient Et tous les voyageurs, aux f'nêtres, Lui envoyaient des billets doux et des lettres Mais quand son amoureux voulait trop insister La sonnette se mettait à tinter Et grand-mère dressait l'oreille : Voilà l' train dix de Marseille